J’ai l’honneur de recevoir les confidences d’Élodie-Jelena,
parisienne, féministe, maman, blogueuse,
et dont le style, les mots, le parcours et la sincérité m’ont énormément touchée.
C’est donc avec plaisir que je les partage avec vous aujourd’hui.
Elle est la maman d’une petite Chiara de 2 ans et se dévoile avec l’authenticité qui la caractérise.
Qui es-tu ?
Je m’appelle Elodie-Jelena, j’ai 29 ans, je travaille depuis plusieurs années dans la communication et le marketing mais ma véritable passion est l’écriture. Adolescente, je tenais déjà un blog mais suite à une rupture amoureuse très douloureuse, j’ai arrêté d’écrire. Puis, j’ai débuté ma vie active, j’ai rencontré de nouvelles personnes, mon conjoint ; il y a plus de 7 ans et ma grossesse a été une grande source d’inspiration pour moi dans la mesure où je me questionnais énormément. J’ai décidé, lors de mon congé maternité de créer un compte Instagram et un blog afin de bénéficier de conseils, d’obtenir peut-être des réponses à mes nombreuses questions et d’échanger avec d’autres futures mamans. Et j’ai bien fait parce que j’y ai finalement rencontré de vraies amies.
Dans quel schéma familial as-tu grandi ?
J’ai grandi dans une famille issue de l’immigration. Il y a toujours eu chez moi, un poids culturel énorme, des traditions légèrement désuètes et des conflits culturels quotidiens. Ma mère n’avait que 17 ans lorsqu’elle a accouché de moi. J’ai donc longtemps été fille unique et considérée comme une princesse. J’ai été surprotégée, très choyée ! Adolescente, j’ai malheureusement eu le contre-coup du poids de ma culture et j’ai explosé. J’ai eu besoin de quitter mes parents pour m’émanciper et trouver ma liberté individuelle. J’ai donc déménagé du domicile familial à 18 ans en conciliant les études et les jobs avant de me poser définitivement avec F. mon conjoint et le papa de Chiara.
Et quel modèle éducatif as-tu reçu ?
Mes parents ont toujours été très « cools ». Toutefois, il y avait un temps pour rire et un temps pour être sérieux. Il n’y a jamais eu trop de tabous ni de non-dits … Les gens de l’Est sont assez excessifs, très « rentre-dedans », et ont le sang chaud. Nous nous sommes autant disputés que nous nous sommes aimés. Mes parents sont arrivés relativement tard en France. Par conséquent, ils ont toujours été très intransigeants sur ma scolarité et mon comportement en classe. Je devais me tenir à carreaux, ne pas me faire remarquer et me plier aux règles. Toutes ces contraintes n’ont fait que renforcer mon besoin de liberté et d’indépendance … Je pense que j’avais besoin de casser ce mécanisme de « perfection » qu’ils avaient involontairement établi en moi et entre nous.
Comment percevais-tu la maternité avant la naissance de Chiara ?
Il y a encore quelques années, éduquer et élever un enfant me paraissait tout simplement impossible. J’ai eu une période assez sombre suite à des problèmes de santé. Je ne me voyais pas du tout maman ni guide spirituel ni encore moins porter le poids d’autant de responsabilités. Je dis souvent que pour bâtir un nouvel édifice, il faut d’abord déblayer le terrain. Je menais une vie bancale et j’ai donc voulu me reconstruire moi-même avant de prétendre élever quelqu’un. Ce travail m’a pris 10 ans. Je n’avais donc aucune vision de la maternité puisque la question ne se posait aucunement.
À quoi ressemblait ton quotidien à cette époque-là ?
Je dis toujours qu’avant, c’était pareil mais en moins bien. Je faisais les choses pour qu’elles aient du sens tandis que depuis qu’elle est née : les choses ont déjà du sens et mon rôle est de faire en sorte que ces sens perdurent afin d’en tirer des bénéfices, des réponses, des morales et des conséquences. Je suis convaincue que nous naissons une seconde fois lorsque nous donnons la vie.
Qui était le plus pressé d’avoir un enfant, F. ou toi ?
Sans doute moi. Je sentais que c’était le « bon moment », que nous étions tous les deux prêts à franchir le cap. Toutefois, je n’ai jamais voulu trop insister. Je voulais que cette décision soit le fruit d’un commun accord. Je refusais de lui « voler » son désir de paternité. Alors, j’ai attendu et un beau soir, dans la cuisine, il m’a tout simplement dit que c’était le bon moment pour se lancer dans l’aventure de la parentalité. J’ai été très émue parce que ça venait à 100% de lui …
Justement, quelle est la place du papa chez vous ?
Elle est égale à la mienne. Nous ne faisons aucune distinction entre nos rôles. Nous avons d’emblée tenter d’installer des petits rituels afin que Chiara puisse profiter aussi distinctement de ses deux parents : F. donne le bain, quand je donne le biberon etc … Puis, chacun est plus fort que l’autre dans certains domaines : F. déteste couper les ongles, quand moi, ça ne me dérange pas du tout ! Nous essayons quoi qu’il arrive de nous faire confiance mutuellement et de laisser de la place à l’autre. Même si la communication est devenue légèrement plus compliquée depuis l’arrivée de notre fille, nous tentons au maximum de discuter au préalable afin d’éviter le conflit. Par exemple, si F. se sent fatigué un soir ou qu’il sort avec des amis, je donnerai le bain volontiers … Rien n’est non plus figé et souvent même notre organisation est un peu aléatoire, pour ne pas dire … complètement désorganisée.
Qu’admires-tu le plus chez lui (en tant que papa de votre fille) ?
Je ne sais pas si l’on peut parler d’admiration. Disons que je découvre chaque jour un nouvel homme que je ne connaissais pas en tant que père de. Et je retombe amoureuse de lui un peu tous les jours. Disons que la paternité a amené de nouvelles qualités en lui et certaines de ses qualités dont il disposait déjà, se sont accentuées comme sa patience légendaire, son calme et sa sérénité qui réussissent toujours à me tempérer et me rassurer. Moi je suis plutôt la tempête. Alors si je devais « admirer » quelque chose en l’homme qu’il est devenu depuis qu’il est papa c’est bien cela : ce pouvoir qu’il a de rendre les choses plus simples quand moi, j’ai tendance à en faire des montagnes.
Et chez toi, qu’est-ce que la maternité a révélé ?
Des traits de caractère que je n’aurais jamais soupçonnés. De vieux amis me disent souvent d’ailleurs « ça m’étonne de toi ! » quand j’évoque la patience dont j’ai dû faire preuve avec Chiara par exemple … Comme quoi ! Disons que je suis devenue plus rationnelle, moins excessive et plus égoïste.
Peux-tu nous dire ce qui a le plus changé depuis la naissance de Chiara ?
Le temps que j’avais pour moi seule. J’ai toujours eu besoin d’avoir quelques heures rien que pour moi – dans le silence absolu. Nous vivons dans un studio qui ne possède pas de chambre. Par conséquent, nous sommes toujours les uns avec les autres. Il est très difficile de trouver quelques heures pour soi. Toutefois, il est aussi très simple de trouver de petites solutions : sortir faire un tour, profiter des siestes de Chiara pour m’accorder quelques plaisirs (lecture, écriture…).
Et dans ton couple ?
Nous passons forcément moins de temps ensemble. Paradoxalement, nous ne disposons pas d’espace pour nous à la maison à cause de la composition de notre logement. Je travaille à temps plein et beaucoup de mon rare temps libre est consacré à mon écriture. Il m’est encore très difficile de jongler entre ces « différentes vies » très prenantes. Le week-end, nous essayons également de profiter de nos familles et de nos amis respectifs … Par conséquent, il ne nous reste que très peu de temps pour nous deux mais pour le moment, cela ne nous dérange pas plus que cela. Ma belle famille habite dans la même rue, je sais que si nous avons besoin de temps pour nous, nous pouvons confier Chiara librement. C’est très rassurant de nous savoir entourés, surtout que ma famille réside à 150km de nous.
Qu’est-ce qui t’a déstabilisée en tant que jeune maman ?
Les gens qui changent. Parmi nos amis les plus proches, nous sommes les seuls à être devenus parents « tôt » (27 ans, c’est tôt ? ). Je pensais qu’il s’agissait d’une légende lorsque je lisais que les amis de toujours devenaient des connaissances et que des connaissances se transformaient vite en véritables compagnons. Je n’en veux à personne, je me dis qu’ils verront quand ils y seront ahaha ! Toutefois, malgré ces mauvaises surprises et ces quelques déceptions, j’ai rencontré, grâce à Instagram, de nouvelles amies – mamans ou pas aux parcours tous très différents. Au final, j’en tire une morale très positive !
Envies-tu certaines choses aux femmes qui n’ont pas d’enfant ?
Non car je sais ce que c’est que de ne pas en avoir. J’ai pu comme elles profiter de cette liberté dont ceux qui n’en veulent pas par exemple parlent. Je connais également ce manque de responsabilités-là et là aussi, j’en ai assez profité pour faire des erreurs, apprendre d’elles et être totalement décisionnaire de mes choix sans qu’elles aient des répercussions sur mon enfant. Il y a quelques années encore, je ne me voyais absolument pas maman moi-même car j’avais beaucoup de choses à régler en moi avant de prétendre élever un enfant pour la vie. C’est une décision cruciale dans la mesure où elle engage pour l’éternité. Je peux tout à fait comprendre, étant passée par là, que certaines ne souhaitent pas (pour le moment peut-être) se lancer dans cette aventure, l’aventure de toute une vie.
Quelle maman penses-tu être aujourd’hui ?
Il m’est très difficile de me décrire. Je pense être une maman relativement souple mais assez ferme. Peut-être suis-je trop focalisée sur certains principes ou valeurs … J’espère qu’avec le temps, j’arriverai à être plus ouverte et plus tolérante. Je débute et les erreurs de parcours seront nombreuses je pense. Je ne me fixe toutefois aucun objectif. Je prône la liberté individuelle et ma fille sera tout ce qu’elle aura décidé de devenir. Je refuserai toujours par contre qu’elle ait honte d’être ce qu’elle est ou qu’elle se prive d’un rêve ou d’un désir par peur de décevoir ou de ne pas être à la hauteur comme je l’ai fait plus jeune.
J’espère ne jamais dénigrer ses émotions, les minimiser, être toujours à l’écoute et mettre de côté mes propres échecs pour la soutenir dans ses choix et ses décisions.
Vois-tu des spécificités à être maman à Paris ?
J’y vois une certaine ambivalence. C’est une ville très dynamique, toujours en mouvement – peut-être un peu trop parfois. J’habite dans un arrondissement familial. Il y a beaucoup de squares, de parcs et de cafés/restaurants adaptés aux poussettes et très accueillants. J’y ai pour ma part mes petites habitudes et m’y sens bien avec ma petite famille. Il y a bien sûr quelques aspects négatifs à y habiter comme l’accessibilité dans les transports en commun et ce côté agressif qu’on certain.e.s parisien.ne.s envers les mamans accompagnées de leurs enfants. J’ai eu quelques mésaventures dans les transports en commun et comble du comble : c’était toujours avec des personnes âgées femmes !
Quel est ton moment préféré de la journée ?
Le moment du biberon. Chiara boit encore son biberon dans mes bras pendant que je lui lis une histoire. C’est le seul petit truc de « nourrisson » qui est resté entre nous.
Et ce que tu estimes le plus difficile dans ton rôle de maman ?
Sans doute la patience. Je suis une impatiente maladive depuis toute petite (mes parents auraient dit « capricieuse » 🙂 ). J’aime que tout se passe comme j’ai prévu et dans les temps impartis. Je n’ai jamais vraiment aimé être surprise ni vivre au jour le jour … Avec la spontanéité d’un enfant, j’ai vite changé de caractère pour devenir plus souple sur les horaires par exemple … Finalement, j’y ai pris goût et je réalise que lâcher du lest fait simplement du bien au corps et à l’esprit.
Et le plus magique ?
Ce truc viscéral que j’ai dans le bas ventre tous les jours avant de partir du travail quand je pense au fait que je vais retrouver ma famille dans quelques minutes.
Qu’aimerais-tu transmettre à ta fille ?
Le respect, l’humilité et la loyauté. Petite fille et fille d’immigrés, je suis très honorée d’avoir été éduquée selon ces trois valeurs qui sont pour moi fondamentales. J’aimerais aussi qu’elle reste libre, qu’elle n’ait jamais honte ou peur de se battre pour de meilleures conditions ou de crier sa façon de penser et de ne pas être d’accord.
Souhaites-tu agrandir la famille ?
Oui, c’est un projet qui nous tient à cœur. Nous avons quelques soucis logistiques à régler avant d’offrir un compagnon pour la vie à Chiara.
Je souhaite des enfants d’âges rapprochés parce que j’ai 8 ans d’écart avec mon petit frère. Entre nous, ça a crée beaucoup de distance et de sacrés fossés …
Quels conseils tirés de ton expérience as-tu envie de donner à d’autres jeunes ou futurs parents ?
Je ne me considère pas comme une maman aguerrie mais si je devais donner un seul et unique conseil aux jeunes mamans un peu perdues par toutes ces émotions nouvelles ce serait de s’imposer dès le départ pour que tout le monde prenne d’emblée sa place : l’oncle, la tante, la belle-mère, nos propres parents aussi … Ne pas se forcer à dire oui quand à l’intérieur c’est non : lorsque quelqu’un veut porter l’enfant à la maternité par exemple, ou l’embrasser ou simplement l’appeler de telle ou telle façon … Les premiers jours/semaines/mois sont très importants pour la maman et la nouvelle relation qu’elle entretient avec son bébé, je pense qu’il est primordial qu’elle profite pleinement physiquement de cet enfant qu’elle a porté durant neuf fois pour qu’elle même puisse trouver petit à petit sa place…
J’aimerais aussi conseiller un ouvrage qui est devenu ma Bible et réunit l’éducation que j’aimerai donner à mon enfant: Chère Ijeawele, ou un manifeste féministe en quinze points
Selon toi, The place to be avec un bébé, c’est … ?
L’été, le parc André Citroën dans le 15ème arrondissement propose des jeux d’eaux ! Quelques copines, du soleil, un maillot et un pique nique et le tour est joué pour passer une superbe journée ! À quelques pas, les parents pourront danser ou boire un cocktail à la guinguette de Javel sur les quais de Seine.
Un bon plan à partager avec d’autres parents ?
Je travaille depuis cinq ans maintenant pour deux sites internet : un de puériculture/mobilier bébé et enfant/mode enfant et l’autre dédié aux jeux et jouets / loisirs créatifs ! Par conséquent, si vous avez besoin de codes de réduction ou de devis, n’hésitez pas à me contacter ! hihi
Ce qu’on peut te souhaiter …
Un appartement plus grand et un petit frère ou une petite sœur pour Chiara ?
Un très grand merci Élodie-Jelena pour le temps que tu as bien voulu me consacrer et pour ce témoignage de « jeune maman » positif et naturel dans lequel de nombreux jeunes ou futurs parents devraient se reconnaître 😉
Je vous souhaite à tous un excellent week-end à vous dis à lundi.
Bises,
Céline.
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